USA: Silence, on tue !
Une nouvelle exécution fédérale est prévue demain 22 septembre 2020, celle d’un condamné à mort soutenu par l’ACAT, William Emmett Lecroy. S’il était exécuté, William serait le sixième depuis que la Cour suprême a autorisé la reprise des exécutions fédérales après dix-sept ans de moratoire, sous l’impulsion du gouvernement de Donald Trump. Ce dernier, soucieux de conserver le soutien de sa base, martèle son attachement à la peine capitale.
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Depuis plus de 10 ans, le groupe ACAT d’Epernay correspond avec William, dans le couloir de la mort à Terre Haute, en Indiana, aux Etats Unis. Marie-Nicole nous a transmis un poème écrit par William…
TIMBER
De cette fenêtre grillagée,
Roussis en bordure d’une prairie,
Je regarde ces pins tordus,
Rangées offrant la sève
De leurs troncs sans écorce ;
Peut-être pleurent-ils, au souvenir du temps
De leur jeunesse, quand ils verdoyaient.
Des bandes d’un orange brillant, comme un collet,
Les étranglent, les condamnent.
Ils n’appartiennent plus à l’écosystème vivant,
Différents en quelque sorte – infestés et hideux,
Ou couverts de moisissures, ou contaminés par la pourriture-
Ils portent le sceau de la mort, mis en quarantaine,
Attendant anxieusement leurs bourreaux.
S’interrogent-ils sur ce destin ?
Sont-ils conscients ? Se battent-ils jusqu’à leur dernier souffle,
Les sens en éveil, toujours sur leurs gardes,
A l’écoute du bruit menaçant des haches,
Du grondement des tronçonneuses
Dont les vibrations font trembler la moindre aiguille brune, desséchée ?
Et quand ils ont rejoint ceux qui sont abattus,
Paralysés et étendus sur le sol de la forêt,
Languissant dans la mort, à l’insu des autres,
Prêts à être débités en morceaux, et tractés,
Hurlent-ils violemment quand on les empile sur le bûcher ?
Enfin consumés. Ils ne sont plus que cendres. Morts et disparus.
Restera-t-il quelque chose d’eux
Ou sombreront-ils dans l’oubli glacial de la mort ?
Existe-t-il un endroit éternel et fertile
Au bord d’une calme rivière baignée de soleil
Où leur esprit pourra s’enraciner ?
Ou peuvent-ils considérer uniquement la mise à mort
Qui attend aujourd’hui, ou demain, ou le jour d’après,
Toute chose vivante finalement,
Même les hommes ici dans le couloir de la mort,
Isolés, vieillissants, mourant comme ces pins ?
Peut-être sont-ils résignés à l’idée
Que, bien trop tôt, nous tous, même les puissants,
Quelque chose vient nous abattre.
Et peut-être redoutent-ils seulement l’arbitraire attente.
William E. LeCroy, Jr
(Poème reçu en 2011)
Timber désigne un bois, des arbres promis à l’abattage. A travers une longue métaphore, William médite sur le sort des hommes dans le couloir de la mort. Sa réflexion s’élargit à notre condition humaine.
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